Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de l’emploi et de la solidarité et du ministre de l’agriculture et de la pêche,
Vu la directive 97/42/CE du Conseil du 27 juin 1997 portant première modification de la directive 90/394/CE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents cancérigènes au travail (sixième directive particulière au sens de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE) ;
Vu la directive 1999/38/CE du Conseil du 29 avril 1999 portant deuxième modification de la directive 90/394/CEE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents cancérigènes au travail, et l’étendant aux agents mutagènes ;
Vu le code du travail, et notamment son livre II ;
Vu le décret no 82-397 du 11 mai 1982 relatif à l’organisation et au fonctionnement des services médicaux du travail en agriculture ;
Vu l’avis du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels en date du 14 juin 2000 ;
Vu l’avis de la Commission nationale d’hygiène et de sécurité du travail en agriculture en date du 27 avril 2000 ;
Après consultation des organisations professionnelles d’employeurs et de travailleurs intéressés ;
Le Conseil d’Etat (section sociale) entendu,
Décrète :
Art. 1er. – L’intitulé de la sous-section 6 de la section 5 du titre III du livre II du code du travail est ainsi rédigé :
« Sous-section 6
« Règles particulières de prévention à prendre contre les risques d’exposition
aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction »
Art. 2. – A l’article R. 231-56 du code du travail :
a) Dans le premier alinéa, après le mot : « cancérogènes », sont ajoutés les mots : « mutagènes ou toxiques pour la reproduction » ;
b) Dans le deuxième alinéa, après le mot : « cancérogène », sont ajoutés les mots : « mutagène ou toxique pour la reproduction » ;
c) A la fin de l’article sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour l’application de la présente sous-section, est considérée comme valeur limite d’exposition professionnelle, sauf indication contraire, la limite de la moyenne pondérée en fonction du temps de la concentration d’un agent cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction dans l’air de la zone de respiration d’un travailleur au cours d’une période de référence déterminée.
Les dispositions de la présente sous-section, à l’exception des articles R. 231-56-1, I, alinéa 3, R. 231-56-3, III, b, g, h, R. 231-56-4-1, R. 231-56-5, alinéas 4 et 5, à R. 231-56-12, s’appliquent aux travailleurs indépendants et aux employeurs, lorsqu’ils interviennent sur chantier, dans les conditions visées à l’article L. 235-18. »
Art. 3. – I. – Aux premier et deuxième alinéas du I de l’article R. 231-56-1 du code du travail, après le mot : « cancérogènes », sont ajoutés les mots : « mutagènes ou toxiques pour la reproduction ».
II. – Le II du même article est ainsi rédigé :
« II. – Lors de l’appréciation du risque, toutes les expositions susceptibles de mettre en danger la santé ou la sécurité des salariés doivent être prises en compte, y compris l’absorption percutanée ou transcutanée. »
Art. 4. – I. – Au I de l’article R. 231-56-2 et aux II et III de l’article R. 231-56-3 du code du travail, après chaque mot : « cancérogène », sont ajoutés les mots : « mutagène ou toxique pour la reproduction ».
II. – Au h du III de l’article R. 231-56-3 du code du travail, les mots : « l’article R. 231-1 » sont remplacés par les mots : « l’article R. 232-1-14 ».
Art. 5. – L’article R. 231-56-4 du code du travail est ainsi modifié :
1o Au premier alinéa, après les mots : « sécurité sociale » sont ajoutés les mots : « des travailleurs exposés, des médecins du travail, du médecin inspecteur régional du travail et de la main-d’oeuvre et des membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, des délégués du personnel » ;
2o Au a et au b, après le mot : « cancérogènes », sont ajoutés les mots : « mutagènes ou toxiques pour la reproduction ».
Art. 6. – Il est inséré un article R. 231-56-4-1 ainsi rédigé :
« Art. R. 231-56-4-1. – I. – Les contrôles techniques destinés à vérifier le respect des valeurs limites doivent être effectués au moins une fois par an par un organisme agréé par arrêté des ministres chargés du travail et de l’agriculture dans les conditions prévues aux articles R. 231-55 et R. 231-55-1.
Les prélèvements sont faits sur des postes de travail en situation significative de l’exposition habituelle. La stratégie de prélèvement est établie par l’employeur, après avis de l’organisme agréé prévu ci-dessus, du médecin du travail, du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, des délégués du personnel.
II. – Le dépassement des valeurs limites fixées par décret en application du 2o de l’article L. 231-2 et de l’article L. 231-7 doit sans délai entraîner un nouveau contrôle dans les mêmes conditions ; si le dépassement est confirmé, le travail doit être arrêté aux postes de travail concernés jusqu’à la mise en oeuvre des mesures propres à remédier à la situation.
III. – Toute modification des installations ou des conditions de fabrication susceptible d’avoir un effet sur les émissions d’agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction doit être suivie d’un nouveau contrôle dans un délai de quinze jours.
IV. – Les résultats de l’ensemble de ces contrôles sont communiqués par le chef d’établissement au médecin du travail et au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, aux délégués du personnel. Ils sont tenus à la disposition de l’inspecteur du travail, du médecin inspecteur du travail ainsi que des agents des services de prévention des organismes de sécurité sociale. »
Art. 7. – A la fin de l’article R. 231-56-5 du code du travail, est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Afin de maintenir ou restaurer les conditions de salubrité dans cette zone, l’élimination des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction doit s’effectuer sans créer de nouveaux risques pour les travailleurs de l’établissement ou l’environnement de ce même établissement. »
Art. 8. – Au I de l’article R. 231-56-6 du code du travail, après les mots : « après avis », sont ajoutés les mots : « du médecin du travail ».
Art. 9. – L’article R. 231-56-8 du code du travail est ainsi modifié :
I. – Au premier alinéa, après le mot : « cancérogènes », sont ajoutés les mots : « mutagènes ou toxiques pour la reproduction ».
II. – Au b, après le mot : « défectueux », sont ajoutés les mots : « conformément aux dispositions de l’article R. 233-42 ».
III. – Sont insérés, après le b, un c et un d ainsi rédigés :
« c) Veiller à ce que les travailleurs ne sortent pas de l’établissement avec les équipements de protection individuelle ou les vêtements de travail.
« d) Lorsque l’entretien de ces équipements est assuré à l’extérieur de l’entreprise, le chef d’établissement chargé du transport et de l’entretien doit être informé de l’existence et de la nature de la contamination, conformément aux dispositions de l’article R. 237-2. »
Art. 10. – L’article R. 231-56-9 du code du travail est ainsi modifié :
I. – Au I et au II, après le mot : « cancérogènes », sont ajoutés les mots : « mutagènes ou toxiques pour la reproduction ».
II. – Au I, après les mots : « conditions de travail », sont ajoutés les mots : « ou, à défaut, les délégués du personnel ».
III. – Au deuxième alinéa du I, les mots : « périodiquement si nécessaire » sont remplacés par les mots : « régulièrement. En tout état de cause, elles doivent favoriser une application des règles de prévention adaptée à l’évolution des connaissances et des techniques. »
IV. – Il est inséré, au I, un troisième alinéa ainsi rédigé :
« Cette information des travailleurs porte sur les effets potentiellement néfastes de l’exposition à ces substances chimiques sur la fertilité, sur l’embryon en particulier lors du début de la grossesse, sur le foetus et pour l’enfant en cas d’allaitement. Elle doit sensibiliser les femmes quant à la nécessité de déclarer le plus précocement possible leur état de grossesse et les informer sur les mesures prévues aux articles L. 122-25-1 et R. 231-56-12. »
Art. 11. – Les III, IV et V de l’article R. 231-56-10 du code du travail sont ainsi rédigés :
« III. – L’employeur tient une liste actualisée des travailleurs employés dans les activités pour lesquelles l’évaluation des risques prévue au I de l’article R. 231-56-1 met en évidence un risque concernant la sécurité ou la santé en précisant la nature de l’exposition et sa durée, ainsi que son degré tel qu’il est connu par les résultats des contrôles effectués.
L’employeur établit pour chacun de ces travailleurs une fiche d’exposition comprenant les informations suivantes :
a) La nature du travail effectué, les caractéristiques des produits, les périodes d’exposition et les autres risques ou nuisances d’origine chimique, physique ou biologique du poste de travail ;
b) Les dates et les résultats des contrôles de l’exposition individuelle au poste de travail ainsi que la durée et l’importance des expositions accidentelles.
IV. – Chaque travailleur concerné est informé de l’existence de la fiche d’exposition et a accès aux informations le concernant. Le double de cette fiche est transmis au médecin du travail.
V. – Sans préjudice des dispositions prises en application de l’article L. 236-3, les informations mentionnées au présent article sont recensées par poste de travail et tenues à disposition des membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, des délégués du personnel. »
Art. 12. – L’article R. 231-56-11 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. R. 231-56-11. – I. – a) Un travailleur ne peut être affecté à des travaux l’exposant à un agent cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction que s’il a fait l’objet d’un examen préalable par le médecin du travail et si la fiche d’aptitude, établie en application de l’article R. 241-57 du présent code ou du I de l’article 40 du décret no 82-397 du 11 mai 1982 relatif à l’organisation et au fonctionnement des services médicaux du travail en agriculture, s’il s’agit d’un salarié agricole, atteste qu’il ne présente pas de contre-indication médicale à ces travaux.
Cette fiche indique la date de l’étude du poste de travail et celle de la dernière mise à jour de la fiche d’entreprise.
L’examen médical pratiqué en application des dispositions de l’alinéa précédent comprend un examen clinique général et, selon la nature de l’exposition, un ou plusieurs examens spécialisés complémentaires auxquels le médecin du travail procède ou fait procéder. Ces examens sont à la charge de l’employeur.
Cette fiche d’aptitude est renouvelée au moins une fois par an, après examen par le médecin du travail.
Chaque travailleur est informé par le médecin du travail des résultats et de l’interprétation des examens médicaux et complémentaires dont il a bénéficié.
Le travailleur ou l’employeur peut contester les mentions portées sur la fiche d’aptitude, dans les quinze jours qui suivent sa délivrance, auprès de l’inspecteur du travail. Ce dernier statue après avis conforme du médecin inspecteur régional du travail et de la main-d’oeuvre, qui peut faire pratiquer, aux frais de l’employeur, des examens complémentaires par les spécialistes de son choix.
Les instructions techniques précisant les modalités des examens des médecins du travail assurant la surveillance médicale des travailleurs exposés à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction sont définies, en tant que de besoin, par arrêté des ministres chargés du travail et de l’agriculture.
b) En dehors des visites périodiques, l’employeur est tenu de faire examiner par le médecin du travail tout travailleur qui se déclare incommodé par des travaux qu’il exécute. Cet examen peut être réalisé à l’initiative du travailleur.
c) Le médecin du travail est informé par l’employeur des absences pour cause de maladie d’une durée supérieure à dix jours des travailleurs exposés aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction.
II. – a) Si un travailleur est atteint soit d’une maladie professionnelle, soit d’une anomalie susceptible de résulter d’une exposition à des agents cancérogènes ou mutagènes, tout le personnel ayant subi une exposition comparable sur le même lieu de travail fait l’objet d’un examen médical, assorti éventuellement d’examens complémentaires.
b) Si un travailleur présente une maladie ou une anomalie susceptible de résulter d’une exposition à des agents toxiques pour la reproduction, le médecin du travail apprécie quels examens mettre en oeuvre pour le personnel ayant subi une exposition comparable.
Dans tous ces cas, conformément aux dispositions de l’article R. 231-56-1 ci-dessus, en vue d’assurer une meilleure protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, une nouvelle évaluation des risques est effectuée.
III. – Le médecin du travail constitue et tient, pour chacun des travailleurs exposés, un dossier individuel contenant :
1o Le double de la fiche d’exposition prévue au III de l’article R. 231-56-10 ;
2o Les dates et les résultats des examens médicaux complémentaires pratiqués.
IV. – Ce dossier doit être conservé pendant au moins cinquante ans après la fin de la période d’exposition.
Ce dossier est communiqué, sur sa demande, au médecin inspecteur régional du travail et de la main-d’oeuvre et peut être adressé, avec l’accord du travailleur, au médecin choisi par celui-ci.
Si l’établissement vient à disparaître ou si le travailleur change d’établissement, l’ensemble du dossier est transmis au médecin inspecteur régional du travail et de la main-d’oeuvre, à charge pour celui-ci de l’adresser, à la demande du travailleur, au médecin du travail désormais compétent.
V. – Une attestation d’exposition aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction est remplie par l’employeur et le médecin du travail dans les conditions fixées par arrêté conjoint des ministres chargés du travail et de l’agriculture. Elle est remise au travailleur à son départ de l’établissement, quel qu’en soit le motif. »
Art. 13. – Il est créé un article R. 231-56-12 du code du travail ainsi rédigé :
« Art. R. 231-56-12. – Les femmes enceintes et les femmes allaitantes ne peuvent être affectées ou maintenues à des postes de travail les exposant à des agents avérés toxiques pour la reproduction. »
Art. 14. – La section 5 du chapitre Ier du titre III du livre II du code du travail est ainsi modifiée :
I. – La sous-section 8 devient la sous-section 9 ;
II. – Les articles R. 231-58, R. 231-58-1 et R. 231-58-2 deviennent respectivement les articles R. 231-59, R. 231-59-1 et R. 231-59-2 ;
III. – Il est inséré une sous-section 8 ainsi rédigée :
« Sous-section 8
« Dispositions spécifiques
à certains agents chimiques dangereux
« Art. R. 231-58. – Les concentrations en benzène et en chlorure de vinyle présents dans l’atmosphère des lieux de travail ne doivent pas dépasser les valeurs limites d’exposition professionnelle définies ci-après :
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« Art. R. 231-58-1. – Les modalités de prélèvement, les méthodes et moyens à mettre en oeuvre pour mesurer les concentrations dans l’air des agents chimiques dangereux ainsi que les caractéristiques et conditions d’utilisation des équipements de protection individuelle contre ces agents sont fixés par arrêté des ministres chargés du travail et de l’agriculture.
« Art. R. 231-58-2. – Il est interdit d’employer des dissolvants ou diluants renfermant, en poids, plus de 0,1 % de benzène, sauf lorsqu’ils sont utilisés en vase clos. Cette interdiction s’applique dans les mêmes conditions à toute préparation notamment aux carburants, utilisés comme dissolvants ou diluants.
« Les femmes enceintes et les femmes allaitantes ne peuvent être affectées ou maintenues à des postes de travail les exposant au benzène.
« Art. R. 231-58-3. – Les jeunes de moins de dix-huit ans ne peuvent être affectés à des postes les exposant au chlorure de vinyle monomère. Ils ne peuvent être exposés au benzène que pour les besoins de leur formation professionnelle. »
Art. 15. – Les décrets no 80-203 du 12 mars 1980 relatif aux mesures de protection des travailleurs contre les risques présentés par le chlorure de vinyle monomère et no 86-269 du 13 février 1986 modifié relatif à la protection des travailleurs exposés au benzène sont abrogés.
Art. 16. – La ministre de l’emploi et de la solidarité et le ministre de l’agriculture et de la pêche sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 1er février 2001.
Lionel Jospin
Par le Premier ministre :
La ministre de l’emploi et de la solidarité,
Elisabeth Guigou
Le ministre de l’agriculture et de la pêche,
Jean Glavany