I – Généralités
Les éthers de glycol se répartissent en deux familles distinctes:
1/ les dérivés de l’éthylène glycol (série E) de formule : R-O-CH2-CH2-OH
2/ Les dérivés du propylène glycol (série P) de formule : R-O-CH2-CH(CH3)-OH
1 – Les dérivés les plus connus de l’éthylène glycol sont :
– le Méthyl-glycol (MG) ou EGME de formule CH3-O-CH2-CH2-OH et de n°CAS : 109-86-4 .
– l’ Ethyl-glycol (EG) ou EGEE de formule C2H5-O-CH2-CH2-OH et de n°CAS : 110-80-5
– le Butyl-glycol (BG) ou EGBE de formule C4H9-O-CH2-CH2-OH et de n°CAS : 111-76-2.
Leurs acétates sont respectivement AMG , AEG et ABG.
2 – Les dérivés du propylène glycol les plus souvent retrouvés sont :
les isomères alpha ou 1-Méthoxy2-propanol et bêta ou 2-Méthoxy2-propanol.
Noms commerciaux :
Cellosolves ou Carbitols (Union Carbide), Oxitols et Dioxitols (Shell)
Emkanols (ICI), Dowanols ( Dow)
II – Propriétés physico-chimiques
Les éthers de glycol sont miscibles à l’eau (hydrophile) et aux solvants organiques (lipophile). Ce sont des liquides incolores, d’odeur légèrement éthérée et agréable. Ils sont peu volatils et ininflammables.
L’ensemble de ces caractéristiques, associées à de bonnes performances techniques, font que l’on retrouve les éthers de glycols dans de nombreuses formulations:
– Peintures, encres, vernis, colles++
– Cosmétiques, médicaments, imprimerie,
– Fluides de coupe, détergents ménagers et industriels,
– Dégraissants, détachants, décapants, antigels…
III – Propriétés cinétiques principales
Les éthers de glycol sont absorbés par voie respiratoire (vapeurs) mais également cutanée (voie favorisée par dilution des éthers de glycol dans l’eau ou les solvants ) et digestive (ingestion accidentelle).
Les éthers de glycol diffusent comme tous les alcools dans les organes richement vascularisés et passent la barrière placentaire.
Métabolisme : – pour les éthers de la série E, l’action des déshydrogénases conduit à la production d’aldéhyde puis d’acide alkoxy-acétique.
La concentration cellulaire excessive de ces métabolites induirait leurs effets nocifs (hématotoxicité, toxicité testiculaire et fœtale chez l’animal).
– pour les éthers de la série P (hormis le 1-Propylène Glycol 2-Méthyl Ether), leur métabolisme se fait via une désalkylation par les cytochromes P450 et aboutit à la formation de CO2 d’où leur moindre toxicité.
IV Toxicité
Toxicité aiguë
1 – Dérivés de l’éthylène glycol.
Les cas publiés d’intoxication aiguë aux éthers de glycol sont très peu nombreuses et concernent la série E (EGME, EGEE, EGBE) ingérés accidentellement. Elle pourrait résulter d’une contamination cutanée étendue mais aucun cas n’a encore été rapporté.
L’intoxication par l’EGME, l’EGEE et leurs acétates se traduit par des troubles digestifs suivis d’une dépression du système nerveux central, une acidose métabolique (augmentation des indosés anioniques), une atteinte tubulaire rénale. Une cytolyse hépatique discrète est possible.
Une intoxication par l’EGBE ou son acétate entraîne une dépression du système nerveux central, une hypotension artérielle, une acidose (avec augmentation des indosés anioniques), une hémolyse modérée, une néphropathie aiguë tubulaire.
2 – Dérivés du propylène glycol.
Le propylène glycol est réputé peu toxique. L’ingestion de fortes doses peut être responsable d’un effet sédatif isolé. L’inhalation pendant une heure d’un aérosol reste asymptomatique. Il n’y a pas de toxicité hématologique retrouvée.
Toxicité à terme
1 – Dérivés de l’éthylène glycol.
– Les éthers de glycol entraînent des phénomènes d’irritation (surtout avec BG).
– Des encéphalopathies et des troubles mentaux organiques ont été observés chez l’homme avec le méthyl glycol (MG).
– Hématotoxicité : Quelques cas d’hémolyse aiguë modérée faisant suite à l’ingestion de plusieurs dizaines de ml d’EGBE ont été publiés. Aucun cas d’hémolyse n’a été rapporté chez des salariés exposés de façon chronique aux éthers de glycol. Les travaux menés in vitro confirment le faible pouvoir hémolysant des éthers de glycol, en particulier l’EGBE qui est le plus hémolysant chez l’animal.
Neutropénie et hypoplasie médullaire ont été observées chez des salariés exposés à l’EGME, l’EGEE et leurs acétates. La toxicité des éthers de glycol sur les populations lymphocytaires humaines semble moins importante que celle observée sur la lignée granuleuse. Un rôle leucémogène possible des éthers de glycol n’est pas confirmé par les études récentes ni le risque de maladies de Hodgking ou de myélome.
– Reproduction :
Actuellement, quatre substances sont classées « toxiques pour la reproduction » en catégorie 2 par la communauté européenne.
Il s’agit de – méthyl glycol (MG) et son acétate (EGMEA)
…….. …… – l’éthyl glycol (EG) et son acétate (EGEEA)
Ces substances ont été interdites à la vente au public en 1997 mais leur usage est autorisé en milieu professionnel.
Toute préparation contenant au moins 0,5% de ces quatre éthers de glycol est étiquetée T avec notamment les phrases de risque R60 (peut altérer la fertilité) et R61 (risque pendant la grossesse d’effets néfastes pour l’enfant).
Le DEGME (n°CAS : 111-77-3) est en catégorie 3 pour la communauté européenne avec la phrase de risque R63 (risque possible pendant la grossesse d’effets néfastes pour l’enfant). Toute préparation en contenant 5% ou plus est soumis à cet étiquetage depuis le 1er Juillet 2001.
– cancérogénicité : les quelques études épidémiologiques conduites sur la relation entre l’exposition aux éthers de glycol et certains types de cancers (leucémie aiguë myéloïdes, cancer de l’estomac, cancer des testicules) n’ont pas apporté de résultats convaincants.
2 – Dérivés du propylène glycol
Deux éthers de glycol de la série P sont classés toxique pour la reproduction de catégorie 2 par la communauté européenne.
Il s’agit du
1-Propylène glycol 2- Méthyl Ether (1PG2ME, n°CAS : 1589-47-5)
et du 1-Propylène glycol 2- Méthyl Ether 1- Acétate (1PG2MEA, n°CAS : 70657-70-4).
Ces deux substances de la série P ont en effet, un métabolisme identique à celui des éthers de glycol de la série E.
V – Surveillance en médecine du travail
1) Évaluation de l’exposition
- VLE – VME : – Ethylène glycol ( vapeurs) VLE = 50 ppm
VME : France : MG = 5 ppm,
EG = 5 ppm,
BG = 25 ppm - Biométrologie : Indices biologiques d’exposition :
– Pour MG et AMG : Acide méthoxyacétique urinaire : 0,8 mg/g de créatinine (à faire le lundi matin, donne le reflet de la semaine)
– Pour EG et AEG : Acide éthoxyacétique urinaire : 50 mg/g de créatinine selon le BAT (RFA), et 100 mg/g de créatinine pour la France et ACGIH (à faire le vendredi soir, en fin de poste)
– Pour BG et ABG : Acide butoxyacétique urinaire : 60 mg/g de créatinine (fin de poste)
2) Surveillance médicale
– La voie de pénétration des éthers de glycol prédominant en milieu professionnel est la voie per-cutanée. Il faudra donc s’assurer de l’état cutané des salariés ainsi que du respect des moyens de prévention individuelle (gants en butyle)
– Une surveillance hématologique systématique ne semble pas justifiée.
– Une biométrologie urinaire peut être intéressante lorsque les conditions de travail ne semblent pas optimales.
– Les substance contenant plus de 0,5% d’éthers de glycol classés toxiques pour la reproduction (EGME, EGMEA, EGEE,EGEEA, DEGME, 1PG2ME, 1PG2MEA) sont soumis à étiquetage avec la mention « toxiques pour la reproduction ». Les salariés manipulant ces produits sont alors soumis au décret CMR du 1er Février 2001.
– Enfin, rappelons que l’arrêté du 11 Juillet 1977 fixant la liste des travaux soumis à surveillance médicale spéciale comprend « les travaux d’application des peintures et vernis en pulvérisation ».
VI – Traitement d’urgence
Le traitement de l’intoxication aiguë est semblable à celui de l’intoxication par l’éthylène glycol.
– Lors de projections cutanées ou oculaires, le lavage immédiat à l’eau pendant 10 à 15 minutes est recommandé.
– En cas d’ingestion :
– lavage gastrique
– correction de l’acidose et de l’hypocalcémie
– traitement symptomatique :
…………… – si convulsions : Valium ou Rivotril
…………….- si coma : intubation, ventilation
– épuration extrarénale : pour éliminer les métabolites et corriger les troubles métabolites induits par l’acidose et les bicarbonates utilisés pour sa correction.
– administration d’éthanol ou de 4 méthyl pyrazole afin d’inhiber l’alcool deshydrogénase et bloquer la production de métabolites.
– En cas d’inhalation, faire éloigner le sujet de la zone polluée et administrer un traitement symptomatique des troubles.
VII. Réparation
TRG 84