I. Etiologies
1. Les rayonnements
a. Rayonnements non ionisants :
La première cause de cancers cutanés professionnels est le rayonnement ultra-violets B : il concerne les travailleurs en plein air exposés au soleil ; mais il existe également d’autres sources d’ultra-violets auxquelles sont exposés les soudeurs à l’arc et les souffleurs de verre. Cliniquement, on observe deux types histologiques : l’épithélioma basocellulaire ou spinocellulaire. Le rôle du soleil est évoqué dans les mélanomes pour les professionnels travaillant en plein air.
b. Radiations ionisantes :
Les cancers cutanés dûs aux radiations ionisantes se développent en général sur un terrain de radiodermite. Cliniquement, on retrouve des spinocellulaires, des basocellulaires et plus rarement des mélanomes. Le délai d’apparition est en général de 25 à 30 ans. Les personnels concernés sont les professionnels travaillant dans l’industrie nucléaire mais aussi les professionnels de santé (Médecine et biologie).
II. Diagnostic
Les lésions cancéreuses cutanées d’origine professionnelles se développent souvent sur des dermatoses chroniques.
Ce sont :
1. L’épithélioma basocellulaire d’évolution lente dont la forme macroscopique est variable mais dont le signe fondamental est la perle translucide. La plaque cicatricielle ou ulcérée à l’intérieur est entourée par une couronne de perles translucides et fermes.
2. L’épithélioma spinocellulaire de pronostic plus sombre, se développe plus rapidement avec possibilité métastatique sous la forme ulcérovégétante avec infiltration profonde et bordures bourgeonnantes et érythémateuses. Plus rarement, il évolue sous la forme végétante pure, formée de cellules atypiques de moins en moins différenciées au sein de cellules saines.
3. La maladie de Bowen dont les lésions sont atypiques au début, avec de simples placards arrondis, papulosquameux. Ensuite, la lésion (unique ou multiple) ressemble à une plaque de psoriasis, d’eczéma ou de dermatophitie. Elle devient légèrement indurée et prend la couleur brun rouge et se couvre de squames et de croûtes. Le diagnostic est souvent fait tardivement. La biopsie montre une dyskératose intradermique avec anomalies nucléaires.
4. Les mélanomes développés à partir de mélanocytes, de pronostic défavorable.
III. Prévention des cancers cutanés professionnels
1. Exposition à des agents chimiques
1.1 Prévention collective.
Elle nécessite la connaissance des produits manipulés, le remplacement par un produit moins dangereux quand le risque pour la santé est important. La fabrication doit se faire soit en vase clos soit en utilisant la ventilation, l’aspiration ou la filtration. Pour les hydrocarbures il faut fréquemment changer les huiles pour éviter d’utiliser des huiles trop usagées. Il faut toujours avoir à l’esprit l’information du personnel.
1.2 Prévention individuelle.
Il faut nécessairement porter des vêtements protecteurs et des gants ; avoir une hygiène corporelle parfaite (vestiaires, douches lavabo…) et éviter de se laver avec des solvants et de l’essence.
1.3 Prévention médicale.
Elle doit être axée sur une surveillance clinique et biologique régulières avec avis spécialisé si besoin.
2. Exposition à des agents physiques.
2.1.Les rayonnements ultra violets.
La prévention repose sur la réduction de l’exposition par l’application de substances filtrantes, la mise en place d’écrans et le port d’équipement de protection individuelle.
2.2 Les rayonnements ionisants.
La réglementation française est définie par :
– le code du travail ;
– le décret 66-450 du 20 juin 1966, modifié par le décret 88-521 du 18 avril 1988, relatif aux principes généraux de protection contre les rayonnements ionisants ; et remplacé par le décret 2002-460
– le décret 86-1103 du 2 octobre 1986 concernant la protection des travailleurs en dehors des installations nucléaires de base, modifié par le décret 88-662 du 6 mai 1988 ; ces derniers textes diffèrent par les mesures administratives et la répartition des responsabilités mais sont identiques pour les autres dispositions ; Ce décret a été remplacé par le 2007-1570.
– les anciens arrêtés d’application et certains décrets, en particulier l’arrêté du 31 juillet 1991 concernant les modalités et le contenu de la carte de suivi médical et l’arrêté du 28 août 1991 approuvant les termes des recommandations faites aux médecins du travail assurant la surveillance médicale des travailleurs exposés aux rayonnements ionisants sont remplacés par le décret n° 2016-283 du 10 mars 2016 relatif à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.
– Le code de santé publique dans son titre III (Prévention des risques sanitaires liés à l’environnement et au travail), chapitre III (Rayonnements ionisants)
Section 1 : Principes généraux (Articles L1333-1 à L1333-6)
Section 2 : Régimes administratifs (Articles L1333-7 à L1333-17)
Section 3 : Applications médicales (Articles L1333-18 à L1333-21)
Section 4 : Réduction de l’exposition de la population au radon (Articles L1333-22 à L1333-24)
Section 5 : Dispositions diverses (Articles L1333-25 à L1333-28)
Section 6 : Contrôle et sanctions (Articles L1333-29 à L1333-32)
La classification des personnels se fait en deux catégories :
La catégorie A : Ce sont des personnes dont les conditions habituelles de travail sont susceptibles d’entraîner le dépassement des trois dixièmes des limites annuelles d’exposition, soit, 15 mSv en exposition globale.
La catégorie B : Ce sont des personnes dont les conditions normales de travail sont telles quelles ne peuvent normalement pas entraîner le dépassement des trois dixièmes des limites d’exposition. Elles ne doivent pas recevoir plus de 15 mSv en exposition globale.
Les limites professionnelles réglementaires d’exposition externe qui sont définies par la législation sont pour un travailleur catégorie A, homme ou femme :
– l’équivalent de dose maximale corps entier reçu au cours de 12 mois consécutifs ne doit pas dépasser 50 mSv ;
– l’équivalent de dose maximale reçue par la peau, les mains, les pieds, les avant-bras et les chevilles, au cours de 12 mois consécutifs, ne doit pas dépasser 500 mSv.
Sur le plan technique, il y a obligation de se conformer à certaines règles : Obtention d’un agrément, déclaration des sources, tenue de registre, désignation d’une personne compétente, délimitation d’une zone contrôlée, contrôle régulier des installations, information des personnels.
La surveillance médicale nécessite une attention particulière pour les sujets exposés avec évaluation régulière des doses reçues, examen minutieux de la peau, radioanalyse des prélévements, examens hématologiques et tenue d’un registre spécial. En cas de dépassement de doses maximales admissibles, il faut exclure l’agent temporairement de la zone contrôlée, faire un bilan clinique et biologique et procéder à une enquête pour déterminer la cause.
IV. Réparation
1. Les rayonnements ionisants :
Le tableau n° 6 du régime général répare les radiodermites aiguës et chroniques provoquées par les rayonnements ionisants avec respectivement un délai de prise en charge de 60 jours et 10 ans. La liste des travaux susceptibles de provoquer ces maladies est une liste indicative.
2. Les rayonnements ultraviolets :
A ce jour, il n’existe pas de tableau de réparation, mais il faut savoir qu’il est toujours possible de faire une déclaration de maladie à caractère professionnel.
3. l’arsenic :
La réparation est indiquée dans le tableau n° 20 du régime général. Les affections cancéreuses cutanées inscrites sont la dyskératose lenticulaire en disque ou maladie de Bowen et l’épithélioma cutané primitif avec un délai de prise en charge de 40 ans. La liste des travaux est indicative.
4.Les hydrocarbures polycycliques aromatiques.
On les retrouve dans deux tableaux du régime général :
Le tableau de réparation n° 16 bis qui prend en charge les épithéliomas primitifs de la peau provoqués par les goudrons de houille, les huiles de houille (comprenant les fractions de distillation dites phénoliques, naphtaléniques, acénaphténiques, anthracéniques et chryséniques), les brais de houille et les suies de combustion du charbon. La liste des travaux est dans ce cas limitative et la durée de prise en charge est de 20 ans.
Le tableau n ° 36 bis prend en charge les épithéliomas primitifs de la peau provoqués par les dérivés suivants du pétrole : extraits aromatiques, huiles minérales utilisées à haute température dans des opérations d’usinage et de traitement des métaux, suies de combustion des produits pétroliers. La liste des travaux est également limitative avec un délai de prise en charge de 30 ans sous réserve d’une exposition minimale de 10 ans.