Décret n° 88-405 du 21 avril 1988 portant modification du code du travail (deuxième partie : Décrets en Conseil d’Etat) et relatif à la protection des travailleurs contre le bruit

Vus

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires sociales et de l’emploi et du ministre de l’agriculture,

Vu la directive n° 86-188 C.E.E du Conseil des communautés européennes du 12 mai 1986 concernant la protection des travailleurs contre les risques dus à l’exposition au bruit pendant le travail;

Vu le code du travail, et notamment les articles L. 231-1, L. 231-2 et L. 233-5;

Vu le code rural;

Vu la loi n° 85-610 du 18 juin 1985 autorisant l’approbation de la Convention internationale n° 148 concernant la protection des travailleurs contre les risques professionnels dus à la pollution de l’air, au bruit et aux vibrations sur les lieux de travail;

Vu le décret n° 82-397 du 11 mai 1982 modifié relatif à l’organisation et au fonctionnement des services médicaux du travail en agriculture;

Vu l’avis de la Commission nationale d’hygiène et de sécurité du travail en agriculture;

Vu l’avis du Conseil supérieur d’hygiène publique de France;

Vu l’avis du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels;

Après consultation des organisations professionnelles d’employeurs et de salariés intéressées;

Le Conseil d’Etat (section sociale) entendu,

Décrète :

Titre I : Protection des travailleurs contre le bruit

Article 1er du décret du 21 avril 1988

L’article R. 232-8 du code du travail est abrogé et remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. R. 232-8. – Principes généraux de prévention :

L’employeur est tenu de réduire le bruit au niveau le plus bas raisonnablement possible compte tenu de l’état des techniques.

 » L’exposition au bruit doit demeurer à un niveau compatible avec la santé des travailleurs. notamment avec la protection de l’ouïe.

« Art. R. 232-8-1. – Contrôle de l’exposition au bruit :

« I. L’employeur procède à une estimation et, si besoin est, à un mesurage du bruit subi pendant le travail de façon à identifier les travailleurs pour lesquels l’exposition sonore quotidienne atteint ou dépasse le niveau de 85 dB (A) ou pour lesquels la pression acoustique de crête atteint ou dépasse le niveau de 135 dB.

 » L’employeur effectue, pour ces travailleurs, un mesurage du niveau d’exposition sonore quotidienne et, le cas échéant, du niveau de pression acoustique de crête.

 » L’employeur procède à une nouvelle estimation et, si besoin est, à un nouveau mesurage tous les trois ans et lorsqu’une modification des installations on des modes de travail est susceptible d’entraîner une élévation des niveaux de bruit.

 » Un arrêté des ministres chargés du travail et de l’agriculture fixe la méthode et l’appareillage qui doivent être utilisés pour le mesurage.

 » Il. Le mesurage est prévu dans un document établi l’employeur. Ce document est soumis pour avis au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, ou, à défaut, aux délégués du personnel, ainsi qu’au médecin du travail

 » Ce document est réexaminé et éventuellement, adapté par l’employeur, lors des modifications des installations ou des modes de travail, ou sur proposition du médecin du travail.

 » Ce document et les avis prévus ci-dessus sont tenus à la disposition de l’inspecteur du travail et des agents du service de prévention des organismes de sécurité sociale.

 » Ils sont également tenus à la disposition des représentants des organismes professionnels d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail créés en application du 4° de l’article L 231-2 pour les entreprises qui en relèvent.

« III. Les résultats du mesurage sont tenus à la disposition des travailleurs exposés, du médecin du travail, des membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut des délégués du personnel ainsi que de I’inspecteur du travail et des agents du service de prévention des organismes de sécurité sociale.

« Ils sont également tenus à la disposition des représentants des organismes professionnels d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail créés en application du 4° de l’article L 231-2 pour les entreprises qui en relèvent.

« Il est fourni aux intéressés les explications nécessaires sur la signification de ces résultats.

« Les résultats doivent être conservés dans l’entreprise pendant dix ans.

 » Art. R. 232-8-2. – Prévention technique collective :

« Lorsque l’exposition sonore quotidienne subie par un travailleur dépasse le niveau de 90 dB (A) ou lorsque la pression acoustique de crête dépasse le niveau de 140 dB, l’employeur établit et met en oeuvre, dans les conditions prévues à l’article L 236-4, un programme de mesures de nature technique ou d’organisation du travail destiné à réduire l’exposition au bruit.

« Art. R. 232-8-3. – Protection individuelle :

« I. Lorsque l’exposition sonore quotidienne subie par un travailleur dépasse le niveau de 85 dB (A) ou lorsque la pression acoustique de crête dépasse le niveau de 135 dB, des protecteurs individuels doivent être mis à sa disposition.

« Il. Lorsque l’exposition sonore quotidienne subie par un travailleur dépasse le niveau de 90 dB (A) ou lorsque la pression acoustique de crête dépasse le niveau de 140 dB, l’employeur prend toutes dispositions pour que les protecteurs individuels soient utilisés.

« III. Les protecteurs individuels doivent être fournis gratuitement par l’employeur à chaque travailleur exposé, les modèles étant choisis par l’employeur après avis des travailleurs concernés et du médecin du travail. Les modèles non jetables doivent être attribués personnellement et entretenus à la charge de l’employeur.

« Les protecteurs doivent être adaptés au travailleur et à ses conditions de travail Ils doivent garantir que l’exposition sonore quotidienne résiduelle est inférieure au niveau de 85 dB(A) ou que la pression acoustique de crête résiduelle est inférieure au niveau de 135 dB.

« IV. Lorsque le port des protecteurs individuels est susceptible d’entraîner un risque d’accident, toutes mesures appropriées, notamment l’emploi de signaux d’avertissement adéquats, doivent être prises.

« Art. R. 232-8-4. – Surveillance médicale :

« I. Un travailleur ne peut être affecté à des travaux comportant une exposition sonore quotidienne supérieure ou égale au niveau de 85 dB (A), que s’il a fait l’objet d’un examen préalable par le médecin du travail et si la fiche d’aptitude établie en application de l’article R.241-57 du code du travail ou de l’article 40-1 du décret n° 82-397 du 11 mai 1982 modifié s’il s’agit d’un salarié agricole, atteste qu’il ne présente pas de contre-indication médicale à ces travaux.

« II. Les travailleurs mentionnés au I font l’objet d’une surveillance médicale ultérieure qui a notamment pour but de diagnostiquer tout déficit auditif induit par le bruit en vue d’assurer la conservation de la fonction auditive.

« III. Un arrêté des ministres chargés de travail et de l’agriculture détermine les recommandations et fixe les instructions techniques que doit respecter le médecin du travail lors de son contrôle, notamment la périodicité et la nature des examens.

« IV. Le travailleur ou l’employeur peut contester les mentions portées sur la fiche d’aptitude, dans les quinze jours qui suivent sa délivrance, auprès de l’inspecteur du travail. Ce dernier statue après avis conforme du médecin inspecteur régional du travail qui peut faire pratiquer, aux frais de l’employeur, des examens complémentaires par les spécialistes de son choix.

« V. Pour chaque travailleur mentionné au I, le dossier médical prévu à l’article L. 241-56 ou à l’article 39 du décret n° 82-397 du 11 mai 1982 modifié, s’il s’agit d’un salarié agricole, doit contenir :

« a) Une fiche d’exposition mentionnant les postes de travail occupés, les dates et les résultats des mesurages du niveau d’exposition sonore quotidienne et, s’il y a lieu, du niveau de pression acoustique de crête;

« b) Le modèle des protecteurs individuels fournis et l’atté-nuation du bruit qu’ils apportent;

« c) Les dates et les résultats des examens médicaux pra-tiqués en application des I et Il du présent article.

« VI. Pour chaque travailleur mentionné au I, le dossier médical est conservé pendant dix ans après la cessation de l’ex-position. Si le travailleur change d’établissement un extrait du dossier médical relatif aux risques professionnels est transmis au médecin du travail du nouvel établissement à la demande du salarié.

« Si l’établissement cesse son activité, le dossier est adressé au médecin-inspecteur régional du travail qui le transmet à la demande du salarié, au médecin du travail du nouvel établissement où l’intéressé est employé.

« Après le départ à la retraite du travailleur, son dossier médical est conservé par le service médical du travail du der-nier établissement fréquenté.

« VII. Chaque travailleur est informé par le médecin du travail des résultats des examens médicaux auxquels il a été soumis et de leur interprétation. » .

VIII. Les résultats non nominatifs des examens médicaux sont tenus à la disposition des membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, des

délégués du personnel ainsi que de l’inspecteur du travail, des agents du service de prévention des organismes de sécurité sociale et des représentants des organismes professionnels d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail créés en application du 4° de l’article L. 231-2 pour les entreprises qui en relèvent.

Art. R. 232-8-5. – Information et formation

I. Lorsque l’exposition sonore quotidienne subit par un travailleur dépasse le niveau de 85 dB (A) ou lorsque la pression acoustique de crête dépasse le niveau de 135 dB, les travailleurs concernés reçoivent une information et une formation adéquates, avec le concours du médecin du travail, en ce qui concerne :

a) Les risques résultant, pour leur ouïe, de l’exposition au bruit;

b) Les moyens mis en oeuvre pour prévenir ces risques, notamment en application de l’article R. 232-8-2;

c) L’obligation de se conformer aux mesures de prévention et de protection prévues par le règlement intérieur ou les consignes;

d) Le port et les modalités d’utilisation des protecteurs individuels;

e) Le rôle de la surveillance médicale de la fonction auditive.

Il. Les lieux ou emplacements de travail où l’exposition sonore quotidienne subie par un travailleur ou la pression acoustique de crête sont susceptibles de dépasser respectivement les niveaux de 90 dB (A) et 140 dB font l’objet d’une signalisation appropriée.

L’employeur réglemente l’accès des lieux de travail lorsque le risque d’exposition le justifie.

Art. R. 232-8-6. – Dispositions particulières à certains travaux spécifiques

I. Pour l’application des articles R. 232-8 à R. 232-8-5 et dans le cas où des travailleurs effectuent des opérations entraînant une variation notable de l’exposition au bruit d’une

journée de travail à l’autre, l’inspecteur du travail peut autoriser exceptionnellement, après avis du médecin du travail et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail

ou, à défaut, des délégués du personnel, à substituer la valeur moyenne hebdomadaire des expositions sonores quotidiennes à l’exposition sonore quotidienne.

Il. Dans le cas où il n’est pas possible de réduire, par des mesures techniques ou d’organisation du travail, l’exposition sonore quotidienne subit par un travailleur au-dessous du niveau de 90 dB (A) et où les protecteurs individuels prévus à l’article R. 232-8-3 ne peuvent assurer une exposition sonore résiduelle conforme au III dudit article, l’inspecteur du travail peut accorder des dérogations à cette disposition pour une période ne dépassant pas trois ans. Ces dérogations sont renouvelables.

Dans ce cas toutefois des protecteurs individuels procurant le plus haut degré de protection possible doivent être fournis.

L’employeur transmet avec sa demande l’avis du d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à des délégués du personnel ainsi que celui du médecin du travail.

Chacune de ces dérogations est assortie de conditions garantissant, compte tenu des circonstances particulières, que les risques supportés sont les plus faibles possibles

Art. R. 232-8-7. – Mises en demeure :

I. L’inspecteur du travail peut mettre en demeure l’employeur de faire procéder à un mesurage de l’exposition au bruit par un organisme agréé choisi par l’employeur sur une liste fixée par arrêté des ministres chargés du travail et de l’agriculture.

L’employeur doit être en mesure de justifier qu’il a saisi l’organisme agréé dans les quinze jours suivant la date de mise en demeure et transmet à l’inspecteur du travail les résultats qui lui sont communiqués dans les dix jours qui suivent cette communication.

Les modalités de I’agrément sont fixées par arrêté des ministres chargés du travail et de l’agriculture.

Il. Les prescriptions des articles R. 232-8 à R. 232-8-6 donnent lieu à l’application de la procédure de mise en demeure prévue à l’article L 231-4. Le délai minimum d’exécution est fixé à quinze jours pour l’article R. 232-8-3 et à un mois pour les autres articles. .


Titre II : Réduction du bruit des machines

Article 2 du décret du 21 avril 1988

Après l’article R. 233-104 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. R. 233-104-1. – Les machines et appareils doivent être conçus, construits et équipés de telle sorte que les risques résultant

de I’émission de bruit soient réduits au niveau le plus bas raisonnablement possible, compte tenu de l’état des techniques.

Une information sur le bruit émis dans des conditions de fonctionnement spécifiées doit être fournie lors des opérations énumérées au premier alinéa de l’article L. 233-5.

Cette information doit figurer dans la notice d’instruction prévue à l’article R. 233-105 accompagnant chaque machine ou appareil.

Un arrêté des ministres chargés du travail et de l’agriculture précise la nature de l’information à fournir, les seuils de niveau sonore à partir desquels cette information doit être donnée et la méthode de mesurage. » .

Titre III : Dispositions finales

Article 3 du décret du 21 avril 1988

Les dispositions de l’article 1er du présent décret sur la protection des travailleurs sont applicables à compter du 1er janvier 1989.

Les dispositions de l’article 2 sur la réduction du bruit des machines sont applicables à compter du 1er janvier 1990.

Article 4 du décret du 21 avril 1988

Le ministre des affaires sociales et de l’emploi et le ministre de l’agriculture sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

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